L’application des ordonnances Macron, la mise en place des CSE génère de plus en plus de conflits dans les entreprises. En effet, le recourt au juridique pour faire invalider une liste électorale devient de plus en plus courant soit du fait d’un ou plusieurs syndicats entre eux soit de l’employeur contre une liste électorale.
Pour la Haute Juridiction, si les sept critères prévus par l’article L. 2121-1 du Code du travail doivent être tous réunis pour établir la représentativité d’un syndicat, ceux tenant au respect des valeurs républicaines, à l’indépendance et à la transparence financière doivent être satisfaits de manière autonome. Les autres, à savoir : l’influence, les effectifs d’adhérent•e•s et cotisations, l’ancienneté dès lors qu’elle est égale à 2 ans, et l’audience dès lors qu’elle est au moins égale à 10 % des suffrages exprimés, doivent faire l’objet d’une appréciation globale.
Parmi l’annulation de liste électorale, nous trouvons également le fait que le syndicat présentant la liste n’ai pas satisfait et respecter les 7 critères de représentativités.
Rappel des critères de représentativités :
1. Le respect des valeurs républicaines
Ce critère est « l’actualisation » du critère de l’attitude patriotique pendant l’Occupation. Il revient au juge d’en définir les contours précis au regard normes constitutionnelles, en particulier les principes contenus dans les Préambules des Constitutions de 1946 et 1958 (liberté d’opinion, politique, philosophique ou religieuse, interdiction de toute discrimination, …)
2. L’indépendance
Il s’agit de l’indépendance par rapport aux partis politiques et mouvements religieux, par rapport à des pays étrangers, et par rapport aux employeurs. La jurisprudence n’a pour l’instant visée que l’indépendance par rapport à l’employeur, et montre que le plus souvent, c’est sur un plan financier qu’elle est remise en cause.
3. La transparence financière
Ce critère est vérifié à travers le respect des obligations de certification et de publications des comptes du syndicat.
4. L’ancienneté
Désormais, une organisation syndicale ne pourra pas être reconnue représentative avant d’avoir une ancienneté minimale de deux ans dans le champ professionnel et géographique couvrant le niveau de négociation, à compter de la date de dépôt légal des statuts.
5. L’audience
Les modalités d’appréciation du critère de l’audience sont désormais objectives. Les organisations syndicales doivent franchir un certain pourcentage des suffrages exprimés aux élections des représentants du personnel, qui varie selon les niveaux de négociation.
6. L’influence
La loi précise que l’influence doit être « prioritairement caractérisée par l’activité et l’expérience ». La Cour de cassation a déjà eu l’occasion d’admettre qu’un accroissement en adhérents et en ressources pouvait démontrer l’expérience d’un syndicat. Concernant l’activité, elle a indiqué, dans son rapport annuel pour 2002, que cette dernière devait être tournée vers la défense des intérêts des travailleurs, et pas seulement en vue de faire connaître le syndicat.
7. Les effectifs d’adhérents et les cotisations
Dans l’ancienne version de l’article L. 2121-1 du code du travail, les effectifs d’adhérents et les cotisations constituaient deux critères distincts. Dans sa jurisprudence antérieure, la Cour de cassation avait admis que leur suffisance ressorte d’une progression des volumes d’adhérents ou de cotisations.
Les derniers jugements portent particulièrement sur l’annulation de liste pour non respect du critère de la transparence financière.
Rappel des obligations comptables en fonction des ressources des syndicats.
Les obligations concernant l’établissement des comptes annuels sont différentes selon trois niveaux de ressources des organisations syndicales :
– entre 0 et 2000 euros ;
– entre 2000 et 230.000 euros ;
– plus de 230.000 euros.
Le calcul des ressources s’établit selon le montant des subventions, les produits de toute nature liés à l’activité courante, les produits financiers et les cotisations, après déduction des cotisations reversées.
La publication des comptes s’effectue dans un délai de 3 mois après l’arrêt des comptes décidé par le bureau du syndicat et l’approbation des comptes par la Commission Exécutive du syndicat. Toutefois, si les ressources sont inférieures à 23.000 €, la publication ne se fait que si cela ne porte pas atteinte à la vie privée de ses membres.
Tous les ans, un procès-verbal de l’arrêt des comptes par le bureau et de l’approbation par la CE est rédigé, signé et conservé avec les documents comptables du syndicat.
Le positionnement de la Cassation sur le critère de Transparence financière.
Pour la Cour de Cassation, les obligations légales liées au critère de transparence financière se déclinent en trois phases :
– établir des comptes annuels, dans des conditions qui diffèrent selon leurs ressources ;
– arrêter les comptes par l’organe chargé de la direction et les faire approuver par l’Assemblée Générale des adhérent•e•s ou par un organe collégial de contrôle désigné par les statuts ;
– assurer la publicité des comptes, selon des modalités qui différent ici aussi en fonction des ressources du syndicat.
POUR NE PAS VOIR SA REPRESENTATIVITÉ REMISE EN COMPTE, IL FAUT DONC PRENDRE EN COMPTE ET IMPERATIVEMENT RESPECTER CES TROIS CRITERES.
Soc., 29 février 2012, pourvoi n° 11-13.748, Bull. 2012, V, n° 83
Cet arrêt précise, d’abord, la manière dont il convient d’apprécier la représentativité des organisations syndicales dans les entreprises ou établissements en application des critères fixés par l’article L. 2121-1 du code du travail.
Dès lors que les critères autonomes sont satisfaits, la représentativité du syndicat doit être appréciée globalement au regard de tous les critères légaux.
Ainsi, les critères relatifs à l’influence – prioritairement caractérisée par l’activité et l’expérience –, aux effectifs d’adhérent•e•s et aux cotisations, à l’ancienneté doivent faire l’objet d’une appréciation d’ensemble.
Cette appréciation d’ensemble était déjà imposée aux juges du fond bien avant la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail ayant modifié l’article L. 2121-1 du code du travail (voir, par exemple, Soc., 19 février 1970, pourvoi n° 69-60.126 ou Soc., 4 mars 1970, pourvoi n° 69-60.118, Bull. 1970, V, n° 161, dont il résulte qu’en l’absence d’une définition de la représentativité syndicale dans la loi n° 68-1179 du 27 décembre 1968 relative à l’exercice du droit syndical dans les entreprises, le juge d’instance doit apprécier celle-ci en fonction de l’ensemble des critères admis dans ce domaine).
L’arrêt juge, ensuite, qu’il n’y a pas de lien nécessaire entre l’obligation faite aux organisations syndicales et l’exigence de transparence financière. Un tribunal ne peut donc pas conclure à l’absence de transparence financière d’un syndicat au seul motif qu’il ne produit pas tous les documents comptables. Ceux-ci ne sont que des éléments de preuve dont l’absence peut être suppléés par la production d’autres éléments que le juge a l’obligation d’examiner.
Ce n’est par conséquent qu’après examen de l’ensemble des éléments fournis par le syndicat que le juge peut éventuellement conclure que ce dernier n’établit pas sa transparence financière.
C’est sur ce principe que dernièrement un syndicat RS-RATP a vu sa liste électorale invalidé par la Cour de cassation le 13 juin 2019 ! Car ces statuts ne prévoyaient pas de dispositions et règles d’arrêt de ces comptes.
ARRET DES COMPTES :
Exemple de rédaction article statut :
Article x Arrêt des comptes.
Le Bureau (ou secrétariat selon statuts) arrête annuellement les comptes du syndicat en vue les faire valider par la direction du syndicat et permettre leur publication prévue à l’article L 2135-1 et suivants du code du travail.
PIECES COMPTABLE PUBLICATION DES COMPTES :
Parmi les pièces comptables justificatives de transparence financière on trouve (liste non exhaustive) ;
1. Les statuts du syndicat ;
2. le livre des comptes, Le bilan, compte de résultat et d’une annexe simplifiée, ou le bilan, un compte de résultat et une annexe selon les modalités définies par règlement de l’Autorité des normes comptables (article D 2135-2 du Code du travail). Dans les trois hypothèses, les comptes doivent être arrêtés par l’organe chargé de la direction et approuvés par l’Assemblée Générale des adhérent•e•s, ou par un organe collégial de contrôle désigné par les statuts (article L 2135-4 du Code du travail) ;
3. la publication des comptes, en fonction des ressources, soit sur le site Internet du syndicat, ou, à défaut, auprès de la DIRECCTE, auprès de la Direction des Journaux Officiels ;
4. les procès-verbaux, comptes-rendus des réunions officielles du syndicat (Bureau, CE, AG, Congrès) ou les comptes ont été arrêtés et approuvés.
Pour plus de renseignement rendez-vous dans l’espace militant du site fédéral, rubrique Réglementaire – Obligation comptable loi 2008